Avez-vous entendu parler du Livre Des Changements, autrement dit « YiJing » 易经?

Certain vous diront que le YiJing est un livre de charlatan pour prédire l’avenir, un truc un peu ésotérique. D’autres pensent qu’il est de coutume de connaitre ses classiques. Ils diront que c’est un incontournable de la culture chinoise. Certains au contraire voient cet objet et ce qu’il contient comme un livre dépassé, d’une autre époque, il serait pour les gens qui sont superstitieux, crédules…

En fait, on dit tout et n’importe quoi.
Quand on parle du « YiJing », les propos sont à nuancer quant à un jugement. Pour cela, il convient d’expliquer comment est apparue cette compilation de poèmes qui sert à orienter les décisions futures.

Le YiJing est un mot composé de deux caractères :

• Yi 易 qui peut se traduire dans ce cas par changer, ou notion de changement. On trouve le caractère soleil sur la négation « ne … pas ». Signifiant « pas de soleil, après il y a du soleil » ou en français « après la pluie, le beau temps » donc une notion de changement.
• Jing 经 quant à lui se traduit par livre, œuvres classiques, œuvres canoniques. La clé de la soie symbolisant l’idée de fils conducteur, de trame ou de base

À l’origine du sinogramme, la divination.

Pour entrer plus en détail dans la compréhension du « Classique des Changements » il convient d’expliquer pourquoi un tel livre.
Pour cela il faut faire un retour à l’âge de la scapulomancie période qui a vu naitre les premiers caractères chinois. C’est vers 1400 à 1100 avant notre ère que né l’écriture sur carapaces et sur os (« jiaguwen » 甲骨文) autrement dit l’art de la scapulomancie.

À partir de ce moment, l’art de la divination va commencer à se structurer. L’utilisation de carapaces de tortue se généralise. Les résultats de la question posée lors de la divination sont archivés. Puis on commence à classer, regrouper puis recouper les résultats en fonction des questions et des évènements qui survenaient. Petit à petit, cette méthode va relever davantage de pratique méticuleuse et scientifique que de divination mystique.
Des signes récurrents apparaissent et forment ainsi un début de langage comme le note Léon Vandermeersch dans « Les deux raisons de la pensée chinoise »

« - Inventé pour formuler par écrit en équations divinatoires les facteurs et le résultat des divinations, il s’est peu à peu métamorphosé en véritable langue graphique parfaitement rodée à l’expression de tous les genres de discours et finalement privatisée. »

Léon Vandermeersch dans « Les deux raisons de la pensée chinoise »

Ce n’est qu’après l’époque de Confucius que l’écriture se démocratise. Elle n’est plus simplement un outil administratif qui gère les données divinatoires, mais un outil de langage.
Le YiJing est au fondement de la culture chinoise dans la mesure où l’écrit a pour origine l’art divinatoire dont il en est la synthèse. De là découle tout le système d’écriture en caractères d’hier et d’aujourd’hui.

Le Grand Classique des Changements

Le « Grand classique des changements » est ce genre de classique qu’il est très difficile, voire même impossible, de comprendre sans support explicatif ou sans traduction. Qu’on soit expert en chinois ou même un Chinois éduqué le « YiJing » reste un ouvrage spécial à comprendre.
Il est composé de 4082 caractères sur un total de 900 mots. Il se compose de 64 figures ou caractères reliés à un hexagramme.

Le YiJing en tant que tel n’est pas un livre qu’on lit au sens où on l’entend, mais est plutôt un ouvrage de consultation. C’est par l’intermédiaire d’une question suivie d’un tirage qu’on le consulte afin de voir le résultat. N’étant pas un outil servant à prédire l’avenir il va plutôt servir de support pour indiquer quelle énergie propice ou non se dégage de l’instant présent afin de mieux orienter la décision future.

Le choix étant laissé au libre arbitre de la personne qui le consulte. Il est une variable d’ajustement pour prendre une décision à un moment donné sans pour autant porter un jugement de façon irrévocable.
La personne qui est actrice de la question se voit proposer un état de fait selon la situation présente.
La réponse n’est pas une obligation dans l’action de faire, mais plutôt de juger s’il est opportun de se lancer dans telle ou telle direction.

Représentations et symboles du YiJing, le Yin et le Yang.

La représentation du YiJing a plusieurs variantes dont la version la plus simple est celle du cercle qui forme le Yin et le Yang ( 阴 et 阳).
La plus courante dans la pratique du YiJing reste celle qui est symbolisée par le cercle du Yin et du Yang inséré dans un octogone. Sur chaque face de l’octogone se trouve un trigramme ( les trigrammes sont plus connus sous le nom de  « BaGua » 八卦 en chinois) qui, associé par deux, va former l’une des soixante-quatre formes de l’hexagramme qui sert au tirage.
Qu’est-ce qu’un trigramme ou hexagramme ? C’est la forme binaire pour représenter le Yin et le Yang lors du tirage. Noté d’un trait plein pour le yang et de deux petits traits pour le Yin.

La consultation du YiJing se fait lorsqu’on a une question. On l’écrit, note la date et on commence le tirage à l’aide de 3 pièces ou de 50 petites baguettes d’achillée qui est la méthode traditionnelle. La méthode des pièces est plus simple d’utilisation pour une consultation à pratiquer chez soi. Le résultat fait apparaitre l’hexagramme. De cet hexagramme on en déduit un caractère noté dans la base du système des 64 idéogrammes. De là vient la consultation qui va avec l’idéogramme. Les commentaires qui viennent avec le texte permettent l’interprétation de la réponse à la question donnée.

Patrimoine de l’humanité

Le Yi Jing est considéré comme l’un des premiers textes chinois et fait partie des textes fondateurs de cette culture. Longtemps perçu comme objet de divination ésotérique il n’est n’y plus ni moins que la synthèse d’un art ancestral pratiqué dans la chine ancienne. Il permet de mettre en lumière le cours des choses, le mouvement perpétuel qui est l’essence même de la vie.